17 Juin 2010
Depuis mon existence, j’ai toujours entendu parler de catastrophes, que ce soit à travers les médias, dans les livres ou dans les contes. Mais, je n’avais jamais pensé que mon pays allait connaitre une catastrophe d’une telle ampleur. Le 12 janvier restera le jour le plus triste pour nous Haïtiens, c’est le coup le plus dur que la nature nous ait donné. Le séisme du 12 janvier de magnitude 7.3 dépasse de loin les différents ouragans qui nous ont frappés depuis deux siècles lorsque nous considérons les lourdes pertes matérielles, humaines, culturelles provoquées par Goudou Goudou comme on l’appelle ici. Je veux à travers cet article traduire et partager mes sentiments et réflexions sur ce qui s’est passé suivant un point de vue rétrospectif et en considérant l’avenir.
Le 12 janvier une catastrophe naturelle
Très peu sont les personnes de ma générations – ou du moins que je connaisse- qui ont eu l’esprit tourné vers les risques sismiques. Après le 12 janvier, c’est devenu un sujet de premier ordre. Tous les survivants se retrouvent en face de la dure réalité que constitue la sismicité d’Haïti due à sa position géographique, et l’existence des failles dans la presqu’ile du sud et dans le nord du pays. Quelques jours après, « L’origine des tremblements de terre » est devenu mon premier thème sur les moteurs de recherche google.fr et autre. A ma grande stupéfaction, des documents faisant état de risque sismique majeurs sur la république d’Haïti existaient longtemps avant le 12 janvier (ref). Tout le XVIIIème siècle haïtien a été ponctué de tremblements de terre dont ceux de 1777, 1770, ont été les plus dévastateurs ; cap-haitien a perdu la moitié de sa population en 1842[1], et Anse-à-Veau a été partiellement détruite tout récemment en 1952[2]. Donc, Haïti est un pays ou le risque sismique est très élevé. Mais hélas, au cours de mes quatorze années d’école ce n’était pas la préoccupation des mes enseignants, je devais surtout gober toute ces doses de littérature étrangère et passéiste et retenir des tonnes de blabla pour obtenir des notes aux examens. Connaitre mon environnement, savoir comment agir face à des situations pratiques de la vie de tous les jours étaient le cadet des soucis des décideurs en matière d’éducation. Voilà ce qui a couté la vie à mes frères et sœurs haïtiens : le mauvais état du système éducatif haïtien.
Cinq mois après
Les secours étrangers n’ont pas mis du temps pour arriver ici, le déferlement militaire américain (plus de 20.000 soldats), la pluie d’ONG se sont abattus sur Haïti avec une rapidité extrême. Avant même que le gouvernement ait eu le temps de prendre la parole, les interventions étaient déjà lancées: distribution d’eau, opérations de secours, etc. Quatre mois après c’est encore le spectacle désolant des décombres dans les rues, l’obstruction des voies de circulation par les tentes de fortune et des tas de déblais par ci par là, un plan de reconstruction méconnu, un sentiment d’incertitude par rapport à l’avenir. Nous attendons encore la recette de la reconstruction que la CIRH veut bien nous proposer. Par ailleurs, certains indicateurs font jaillir de sérieux doutes sur la viabilité de ce projet. L’Organisation des Nations pour l’Alimentation dépense la modique somme de 72 500 dollars quotidiennement pour loger son personnel dans un luxueux paquebot (le Ola Esmeralda). Ce serait une mesure indispensable pour assurer le bien être des employés qui serait mieux préparés à aider, selon un responsable[3]. Ce ne sont pas les petites folies des faiseurs de développement qui vont nous ruiner, c’est plutôt notre attitude complaisante face à l’inacceptable. Pourquoi c’est un journal étranger qui s’intéresse à l’utilisation des fonds de la reconstruction ? N’avons-nous pas de personnes avisées qui pourraient mener de solides enquêtes sur la question et inciter plus de transparence dans la gestion des fonds ?
Ce qui pointe à l’horizon, ce sont les anciennes querelles pour la conquête du pouvoir au milieu d’un environnement dégradé et d’une population oubliée. Les seuls motifs qui guident cette quête insatiable de pouvoir n’est que le désir d’enrichissement personnel- c’est peut être aller trop loin, mais nous ne sommes pas convaincus de la capacité et de l’intention de ses hommes à soutenir le développement durable du pays.
Le 12 janvier n’est pas seulement un sinistre épouvantable, c’est aussi une opportunité historique qui nous est offerte pour enclencher le processus de fondation et la construction d’une nouvelle société où les droits des tous les citoyens haïtiens soient reconnus et respectés. En 2010, l’éducation, le courant électrique, la santé, la sécurité sociale, un logement décent ne constituent plus des inventions récentes qui doivent êtres mises en œuvre par des occidentaux. Ce sont des décisions politiques conscientes dépassant les intérêts personnels pour rejoindre les besoins collectifs qui donnent lieu à la mise en place de telles mesures. L’adoption des stratégies favorisant la satisfaction de ces besoins sociaux peut être à l’origine de frictions sociales importantes liées au fait que le maintien statu quo fait le beurre de beaucoup d’individus et groupes sociaux connus et méconnus, internes et externes, progouvernementaux et antigouvernementaux. Ca vaut la peine d’essayer que de s’apitoyer sur notre sort en répétant les slogans humiliants qui nous indexent sur le plan international : Haïti pays le plus pauvre de l’hémisphère américain, Haïti pays non recommandé, Haïti pays du sida et tous les autres bla bla bla que vous connaissez.
C’est le temps de l’indignation face à l’hypocrisie de nos soi-disant amis, le moment de demander des comptes, l’instant de la primauté de la raison, le carrefour d’une décision pour une Haïti plus juste. Ceci n’est pas un pamphlet de propagande, ni le soupir d’un aigri. Ce sont les réflexions d’un haïtien motivé par la catastrophe du 12 janvier et l’Etat actuel du pays. Vos réactions et suggestions seront les bienvenues pour aider l’auteur à s’améliorer et pou animer les débats qui doivent nous mener vers ce que nous voulons tous : Une Haiti où il fait bon vivre.
Al-Hex
17 juin 2010
A suivre.....................................................
[1] Voir Claude Prépetit, Aléa et risque sismique en Haïti, BME (www.bme.gouv.ht/alea%20sismique/Aléa%20et%20risque%20sismique%20en%20Haïti%20VF)
[2] http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_catastrophes_sismiques
[3] Voir le site internet : http://lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=80463&PubDate=2010-06-15
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